Essais biographiques

Pierre Dhainaut, coll. « Présence de la poésie », Les Vanneaux, 2008
Texte de quatrième de couverture

« Les mots dans les poèmes […] ne seront justes que s’ils renoncent à se mettre en avant pour contribuer à la création de l’ensemble, lequel, en retour, leur apportera le rayonnement. Dans la recherche de cette justesse, les chemins s’effacent, le poète oublie ses intentions et ses ambitions, il ne reçoit de soutien, d’énergie, que de son écoute. […] J’appelle écoute ce sens qui n’est jamais acquis de la générosité. L’initiation se poursuit de poème en poème, de relais en relais. Aucun poème ne me comble, l’aurais-je accompagné fidèlement, ou pour mieux dire il ne me comble que s’il reste un passage : je le confie au lecteur quand le vers ultime me semble par miracle augural. »

Extrait du livre

« Entrer, entrer en connivence, / la pluie nous éveille, l’éclaircie. »
C’est par la lecture d’Introduction au large (2001) que je suis entrée dans l’œuvre de Pierre Dhainaut. Peu de temps après, j’ai fait sa connaissance.
Est-il fréquent de rencontrer un poète et un homme si accordés l’un à l’autre ?
« Nous guider sur les souffles », « réconcilier la nuit, la source »… Toujours fluide, sa parole se retire volontiers pour se mettre à l’écoute, tandis que sa mémoire garde avec précision telle ou telle phrase, prononcée au hasard de la conversation. Sur son visage passe parfois l’ombre d’une mélancolie, vite effacée par le sourire, l’«esprit de bienvenue».
À ma demande, il se rendra par deux fois dans le collège où j’exerce, pour partager son goût des paroles « justes », pleine¬ment ouvert à ces jeunes élèves qui ignorent presque tout de la poésie. Ouvert à tous les enfants, même à ceux de passage, dont il s’informe régulièrement et retient les nouvelles. « Enfant qui nous ordonne en courant de le suivre / […] / nous ne pouvons aller qu’en son sillage».
«Appuie-toi sur l’écoute»… La même disponibilité habite Jacqueline, son épouse, dont la vive présence laisse deviner l’im¬portance du rôle joué à ses côtés.
Si je songe aux crises qu’il traversa, le voir aujourd’hui suffit à me convaincre que la poésie sait se rendre utile au poète autant qu’à ses lecteurs – pour le construire, le transformer et l’ouvrir. »

Lien

  • Pierre Dhainaut, page wikipedia ici
Raymond Farina, coll. « Présence de la poésie », Les Vanneaux, 2019
Texte de quatrième de couverture

« Aucun tempo individuel ne saurait être juste s’il se dissocie de l’élan universel. Aussi la mélodie singulière de Raymond Farina s’allège-t-elle au cours de l’œuvre poru mieux tisser – comme le geste de l’oiseleur ou de l’épeire – le réseau subtil de résonances multiples : langues plurielles, recueillies sous la plume du poète-traducteur ; styles divers, du fragment au vers narratif ; souvenirs foisonnants, empruntés aux terres traversées ; mémoire de temporalité distantes, depuis les « lettres de l’origine » jusqu’à l’« orgie de sons », bavards ou tragiques, de la modernité. »

« Au bout de mes doigts je détiens / ces blancs oiseaux cunéiformes / […] // les voici insoucieux de moi »…

Extrait du livre

« Depuis plus de trente ans, je m’étais imprégnée de ces vers d’un poète dont j’ignorais tout. Le recueil Archives du sable m’était parvenu au hasard de mes lectures dans les bibliothèques. Ce livre, qui n’avait pas même le prestige d’un ouvrage relié (je n’avais pu en garder la trace que sous la forme de photocopies), je ne l’ai jamais oublié. J’aimais la vigueur de cette plume « creusant ameublissant le sens » : « trembler de ne sauver / l’insignifiant / arracher à leur mort lacunaire / hommes et dieux leurs noms / érodés »… Est-ce que, depuis l’enfance, je ne cherchais pas aussi, en mon for intérieur, à creuser le sens, à sauver quelques dieux du chaos ? Mon crayon maladroit noircissait des pages entières de formules que j’aurais voulues décisives, incandescentes. Perdue que j’étais parmi « démarches gestes identiques / identiques gestes visages / masques langages identiques / rien que ces officiels reflets », je savais ce qu’était « le temps fermé à double tour ». Et me sentais – littéralement – ensevelie dans le « linceul » de ma propre « peau »… Contemplant les visages de la rue, il me semblait toujours avoir perdu la clef de l’énigme ; sans doute n’étais-je pas la seule, mais je l’ignorais…

« sommes-nous vivants ou archives ? »

Pour retrouver le sentiment d’être vivante, j’avais besoin d’une langue dense, intense, ardente, capable de « défaire l’hiver » et « d’attester chaque goutte de vie ». […]
Telle fut ma première rencontre – toujours renouvelée – avec cette poésie.
Lorsque plus de trente ans après, j’y revins, ce fut pour chercher d’autres recueils, puis m’aventurer à contacter ce poète inconnu qui m’avait fait tant de bien. J’ai découvert alors une œuvre entière, avec sa cohérence et ses contrastes, ainsi qu’un homme, au bout du monde, humble voyageur de l’âme et de ses signes perdus… »

Liens

  • Article de Sabine Huynh ici.
  • Article de Jean-Paul Gavard-Perret ici.
  • Page Wikipedia de Raymond Farina ici.